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 d’ADHEOS

Le nouveau Premier ministre, Gabriel Attal, est le premier ouvertement gay dans l’histoire de la France. Si sa nomination brise un plafond de verre historique, il va inévitablement susciter des attentes fortes sur les sujets LGBTQI+.

En mai 2023, alors que Le Refuge fête ses 20 ans au dernier étage d’un hôtel sélect, un ministre en vue fait une apparition. À peine arrivé, Gabriel Attal claque la bise à Pacôme Rupin, ancien député macroniste devenu directeur général de la fondation qui accueille des jeunes LGBTQI+ en rupture familiale. L’alors ministre chargé des comptes publics vole clairement la vedette à son homologue des transports, Clément Beaune, et à Sarah El Haïry, secrétaire d’État à la jeunesse, deux autres représentants du gouvernement également LGBT. Après un discours convenu, Gabriel Attal retourne à son ministère avec le sentiment du devoir accompli. Mais au fond, l’est-il vraiment ? Le point sur son bilan LGBTQI+, ainsi que sur les dossiers qui l’attendent.

  • Éducation : le harcèlement scolaire homophobe

Dans une interview intimiste en novembre 2023 sur TF1, Gabriel Attal, tout nouveau ministre de l’éducation nationale, a témoigné avoir lui-même subi en tant qu’élève “un déferlement d’insultes et d’injures” homophobes. Au passage il vise sans le nommer l’avocat Juan Branco, qui fut son camarade de classe et qui, bien plus tard, en 2018, a outé le ministre dans un livre-pamphlet. Sur le dossier primordial du harcèlement scolaire, assure le jeune ministre de 34 ans, “je me bats pour mettre en place tous les moyens (…) pour qu’il y ait quelqu’un pour les écouter, pour qu’il y ait une institution qui réagit et qui répond”. Ses quelques mois à la tête de l’Éducation nationale lui ont donné l’occasion d’être proactif sur le sujet, jusqu’à importer du Danemark, modèle en la matière, des “cours d’empathie” pour les enfants jusqu’au CM2. En expérimentation depuis le lundi 8 janvier, ces cours doivent être généralisés à la rentrée de septembre.

Reste que si la lutte contre le harcèlement passe avant tout par l’éducation, peut-elle être complètement efficace si le sentiment d’impunité perdure ? En janvier 2023, le suicide de Lucas, collégien de 13 ans, a provoqué un émoi national. Et si la justice a relaxé les quatre ados accusés dans cette affaire, le ministère a promis une enquête administrative pour établir les responsabilités éventuelles du collège de Golbey, dans les Vosges, où l’adolescent était scolarisé. Mais selon une enquête récente de Mediapart, l’enquête administrative n’a jamais eu lieu. Et Gabriel Attal n’a pas voulu répondre aux questions de nos confrères visant à comprendre pourquoi.

  • La reconnaissance des victimes de lois homophobes

Gabriel Attal n’était pas né quand, en 1982, Robert Badinter lança à l’Assemblée nationale : “Il est temps de prendre conscience de tout ce que la France doit aux homosexuels”. À cette époque, le garde des Sceaux de François Mitterrand doit ferrailler avec l’opposition de droite pour abolir le “délit d’homosexualité“, ou les dernières dispositions législatives permettant à la France de persécuter les homosexuels. Quelque 40 ans plus tard, une proposition de loi a été adoptée en novembre au Sénat pour reconnaître cette tache dans notre histoire. Pour aboutir, le texte doit encore être adopté à l’Assemblée nationale, qui discutera également d’une forme d’indemnisation des victimes toujours vivantes. On attend un soutien du gouvernement.

  • Année charnière pour l’Europe

Alors que 2024 est une année électorale pour renouveler le Parlement européen, gardons en tête les leçons de Jacques Delors, artisan de l’Europe mort le 27 décembre dernier. La France doit porter l’ambition d’une Europe protectrice, notamment lorsqu’il s’agit des droits individuels. Dans plusieurs États membres, comme en Hongrie, les gouvernements conservateurs attaquent les personnes LGBTQI+ et leurs droits. Si les institutions de Bruxelles se sont interposées, cette position est fragilisée par la guerre en Ukraine et la nécessité d’un effort unanime. La diplomatie française s’est également donnée comme objectif la dépénalisation universelle de l’homosexualité, mission confiée à Jean-Marc Berthon, ambassadeur dédié. 

  • Transidentité : à quand l’autodétermination ?

Juste avant le changement d’année, le Conseil d’État s’est prononcé en faveur d’une circulaire uniformisant les règles concernant l’accueil des élèves transgenres dans les établissements scolaires. En parallèle, un rapport doit être remis en septembre 2024 au ministère de la santé pour améliorer la prise en charge médicale des personnes trans. Attendu de longue date, il pourrait également proposer la déjudiciarisation du changement d’état civil, une réforme réclamée par les personnes concernées qui ne veulent plus passer devant un magistrat pour simplement changer de prénom et de genre à l’état civil.

Sur ce sujet, Gabriel Attal s’est fait épingler en 2021 pour avoir donné une interview au magazine Valeurs Actuelles qui avait choisi de faire sa une… sur un pseudo “délire transgenre”. S’il s’est dit “heurté” par un dossier risquant de “provoquer des discriminations supplémentaires”, il s’est justifié en ces termes : “Je suis porte-parole du gouvernement, j’assume de répondre aux demandes d’interview qui me sont faites et de parler à tout le monde”.

  • Chemsex, la nouvelles épidémie

La jeunesse de Gabriel Attal le protège du traumatisme des années noires du sida. En revanche, la pratique du chemsex provoque de nos jours des ravages au sein de la communauté gay. Une coordination nationale est nécessaire pour faire de la prévention, et des élu-es de tous bords y sont favorables. Il est également temps de donner les moyens aux équipes médicales de prendre en charge les personnes qui en ont besoin.

  • GPA, des vœux aux actes

Officiellement en couple avec l’eurodéputé Stéphane Séjourné, Gabriel Attal a évoqué dans Libération, qui lui accordait un portrait en avril 2019, son désir d’enfant, envisageant la possibilité de recourir à une GPA éthique “si c’était légal en France”. Depuis le ministre, lui-même né d’une PMA, n’a pas remis l’idée sur l’établi, contrairement à Clément Beaune qui a poussé l’idée “à titre personnel”. À vrai dire, depuis qu’Emmanuel Macron a rejeté l’idée, personne au sein de son parti ne porte plus le sujet, alors même qu’une majorité de Français y sont favorables. C’est l’occasion de le faire changer d’avis…