Un arrêté, paru le jeudi 7 juillet dans le «Journal officiel» entérine le classement du nitrite d’alkyle parmi les stupéfiants et l’interdiction sans délai de leur commercialisation. Au Syndicat national des entreprises gaies, on explique pourquoi la riposte va être difficile à organiser.
Les fans de poppers n’ont plus que leurs réserves pour sniffer. Le gouvernement a joint l’acte à la parole, et a fait paraître au Journal officiel du jeudi 7 juillet l’arrêté interdisant la commercialisation des «arômes» ou «poppers», soit tous les produits à base de nitrites d’alkyle, encore aujourd’hui très utilisés dans le milieu gay.
On se souvient que c’est le président de la Mission interministérielle de Lutte contre les Drogues et Toxicomanies, Etienne Apaire, qui en avait fait l’annonce (lire article) en constatant l’accroissement de la consommation de ces produits auprès des jeunes.
Le poppers avec les drogues
Au Syndicat national des entreprises gaies(Sneg), on fait grise mine: l’arrêté paru jeudi, signé par le ministère de la Santé, devrait être plus solide que la première interdiction, par décret, datant de 2008 et combattue avec succès par le Sneg devant le Conseil d’Etat. En effet, cet arrêté ne se contente pas de mettre fin, avec exécution immédiate, au commerce du poppers en France, même dans leur version soft qui était encore légale en France: il applique du même coup au nitrite d’alkyle la réglementation des produits stupéfiants. Or, c’est justement parce que la loi ne considérait pas encore le poppers comme un stupéfiant que les associations avaient pu faire annuler la première interdiction. Cette fois, le gouvernement a revu ses méthodes… avec un œil sur l’argumentaire fourni alors par le Sneg.
«C’est aberrant de s’en prendre ainsi à un produit qui était encore légal le mois dernier, quand on sait que le cannabis est consommé par 13 millions de Français», fulmine Rémi Calmon, le directeur exécutif du Sneg, qui juge cette mesure de sécurité «cosmétique».
Selon lui, le nitrite d’alkyle n’est réellement dangereux que s’il est associé à un vasodilatateur tel que le Viagra. «Pour faire passer l’info sur les précautions à prendre et prévenir une nouvelle interdiction, on avait, depuis l’annulation par le Conseil d’Etat du décret de 2008, diffusé aux grossistes à 500.000 exemplaires un mini-prospectus (ci-contre), à donner avec chaque bouteille d’arôme vendue. «Hélas le gouvernement, qui ne nous a ni rencontré ni prévenu de sa décision, n’a pas tenu compte de cette campagne de prévention», explique encore Rémi Calmon.
Les commerçants, eux, sont mis face à leurs responsabilités. Ceux qui ont encore des stocks de flacons choisiront peut-être de les écouler au plus vite – en espérant ne pas se faire prendre par un contrôle de police, qui, à notre connaissance, n’ont pas encore eu lieu. D’où la présence d’arômes sur certains étals cette semaine.
Quant aux consommateurs qui ne voudront pas renoncer au sniff, une fois leurs stocks personnels épuisés, ils risquent de se fournir sur internet en produits plus forts tels que des nitrites de pentyle ou de butyle, interdits en France depuis 1990… ou d’autres produits plus dangereux encore. A moins d’un nouveau recours devant le Conseil d’Etat contre cette nouvelle interdiction? Au Sneg, on s’interroge toujours sur l’argument juridique qui pourrait renverser à nouveau l’interdiction.