NEWS
Les actualités
 d’ADHEOS

L’État de Washington doit se prononcer sur le mariage homosexuel lors d’un référendum qui se tiendra en novembre. À cette occasion, de nombreuses entreprises ont choisi de s’engager dans la campagne référendaire, preuve que les mentalités évoluent. 
 
Les entreprises américaines s’engagent dans la campagne pour le mariage homosexuel. Jeff Bezos, fondateur d’Amazon, a frappé un grand coup en annonçant, vendredi 27 juillet, qu’il allait verser, à titre personnel, 2,5 millions de dollars (1,62 million d’euros) à l’association Washington United for Marriage (WUM), qui milite en faveur du mariage gay. Aux États-Unis, la législation sur les unions homosexuelles relève des États fédérés.
 
“C’est une contribution extraordinaire qui va faire une énorme différence dans la campagne pour défendre le droit des homosexuels“, a réagi Zach Silk, directeur de campagne de l’association WUM. Amazon, basée à Seattle, n’est pas la seule société à soutenir le mouvement : le mois dernier, le PDG de Microsoft, Steve Ballmer, et son, cofondateur, Bill Gates, ont donné chacun 100 000 dollars (81 108 euros). Et la liste ne s’arrête pas là : Starbucks, dont le siège social est lui aussi situé dans l’État de Washington, a également mis la main à la poche, ainsi que Google, General Mills ou encore Nike. Jusqu’à présent, WUM a reçu plus de cinq millions de dollars (4,05 millions d’euros) pour mener campagne à l’occasion du "Référendum 74", qui porte sur la légalisation des unions entre individus de même sexe.
 
La légalisation du mariage gay fait l’objet d’un vif débat dans l’État de Washington depuis plusieurs mois. En février dernier, son gouverneur, Chris Gregoire, a promulgué une loi légalisant l’union des couples de même sexe, qui devait entrer en application en juin. Mais elle a été suspendue à la demande de plusieurs opposants qui ont rédigé une pétition ayant recueilli 240 000 signatures. En conséquence, les habitants de l’État du nord-ouest du pays devront se prononcer lors d’un référendum qui se tiendra en novembre. D’autres États, comme le Minnesota et le Maryland, organiseront eux aussi un référendum dans les mois à venir.
 
"Une question générationnelle"
 
En se positionnant en faveur du mariage gay, ces firmes envoient un message fort à la société américaine, estime Frédéric Martel, auteur de "Le Rose et le Noir : les homosexuels en France depuis 1968". "Amazon, Google, et toutes les entreprises des nouvelles technologies ont pris conscience que cette question était générationnelle, commente-t-il. Plus la population est jeune et plus elle vote en faveur du vote gay."
 
Selon un récent sondage, 50 % des Américains se sont déclarés favorables à l’union de deux personnes du même sexe. Pour Frédéric Martel, le soutien affiché des démocrates illustre cette évolution des mentalités. "Lorsque Clinton était président (1992-2000), il soutenait la cause homosexuelle mais ne s’était pas positionné sur la question du mariage gay. À l’époque, c’était encore un sujet trop sensible", relève encore Martel, qui juge que le virage a été opéré le 17 mai 2004, lorsque l’État du Massachussetts a légalisé le mariage homosexuel. "La question est alors devenue un débat national et les militants de chaque État sont partis à l’offensive pour légiférer", poursuit-il.
 
Pour mener campagne, les activistes ont besoin d’argent et font appel aux entreprises, qui sont alors appelées à se positionner. Ce fut notamment le cas en 2008, lors du référendum sur le mariage gay en Californie. De nombreuses entreprises avaient alors soutenu financièrement les associations pro-gay, comme Apple qui leur avait donné 100 000 dollars. "Les entreprises s’engagent davantage dans les mouvements en faveur du mariage gay, constate Frédéric Martel. Et il existe, en fait, peu de groupes anti-mariage gay. Il s’agit essentiellement d’associations évangéliques ou de réseaux issus de la droite conservatrice."
 
Toutefois, le soutien des entreprises ne présage pas d’une victoire des pro-mariage gay lors du référendum de novembre. "Par le passé, tous les référendums sur cette question ont penché en faveur de l’interdiction des unions homosexuelles", souligne Frédéric Martel. En Californie, le référendum sur l’autorisation du mariage gay avait été rejeté par 52,1 % des voix contre 47,9 %. Depuis, la Cour suprême a jugé cette interdiction "anticonstitutionnelle".
 
Ces donations sont aussi un moyen pour les entreprises soutenant les unions gay de courtiser les homosexuels, qui représentent un pouvoir d’achat de 800 milliards de dollars (650 milliards d’euros) par an aux États-Unis, selon le puissant lobby gay Human Rights Campaign (HRC). Adopter cette loi "sera bon pour nos affaires et pour l’économie du pays", a affirmé à l’AFP la porte-parole de Microsoft, Serina Hall. Sur son blog, le vice-président de General, Mills Ken Charles, a, de son côté, estimé que "les communautés intégrées réussissent mieux sur le plan économique".
 
Chick-fil-A défend "la définition biblique de la famille"
 
Le positionnement des entreprises relève davantage de la politique que du marketing, estime pour sa part Steven Ekovich, professeur de sciences politiques à l’American University of Paris. C’est le cas de la polémique autour de la chaîne de restauration rapide Chick-fil-A, connue pour ses positions conservatrices. Son PDG, Dan Cathy, a récemment déclaré dans une interview qu’il défendait "la définition biblique de la famille", provoquant la colère des associations de défense de droits des homosexuels. Elles ont immédiatement appelé à un boycott des 1 600 restaurants de la chaîne, tandis que les conservateurs ont appelé à une journée de soutien – le 1er août – en allant y manger.
 
Les maires de New York, Boston, Chicago et San Francisco ont aussi pris position dans ce débat. Le maire de Boston, le démocrate Thomas Menino, a notamment annoncé que "Chick-fil-A n’avait pas sa place" dans sa ville : "Vous ne pouvez pas avoir une entreprise à Boston qui fait preuve de discrimination envers une partie de la population. Nous sommes une ville ouverte, à l’avant-garde de l’inclusion".
 
Depuis, ce sujet a pris une place non négligeable dans la campagne présidentielle. Le président démocrate Barack Obama s’est déclaré en faveur du mariage homosexuel et envisage de faire de ce sujet un enjeu majeur de sa campagne. De son côté, le candidat républicain Mitt Romney n’a pas hésité à désigner Chick-fil-A comme son restaurant favori. Les couples gay et lesbiens peuvent déjà se marier dans les États de New York, dans le Connecticut, l’Iowa, le Massachusetts, le New Hampshire et le Vermont, ainsi qu’à Washington D.C.