Insultes homophobes, coups de poing… Nicolas, 28 ans, a été violemment agressé dimanche par son voisin, qui a été placé en garde à vue ce matin. Il témoigne pour TÊTU
J’ai cru que j’allais mourir». Dimanche, Nicolas (photo), chauffagiste de 28 ans a été roué de coups, par son voisin du dessus, dans un quartier paisible du centre de Bordeaux. «Vers 23 heures, en arrivant chez moi, je me suis trouvé face à lui et avant même d’avoir eu le temps de rentrer dans mon appartement, il m’a projeté à terre et assené coup de poing sur coup de poing. A chaque impact, je voyais une lumière blanche, j’étais recroquevillé sur le trottoir. Plus grand que moi, plus fort, il hurlait « je vais te faire fermer ta sale gueule de PD ».
Alertés par les cris de Nicolas, deux riverains interviennent. L’agresseur rentre chez lui…
Nuit aux urgences
Quelques mois auparavant, après qu’il eut sans doute compris que Nicolas était homosexuel, le voisin s’était déjà fait insultant. Au point que le jeune gay dépose une main courante. Puis porte plainte en juin, suite à une série de menaces homophobes. Durant l’été, le voisin était entendu par la police, prétextant à son tour des injures raciales et du tapage. Sans jamais avoir pourtant entamé quelque procédure en ce sens…
Et puis il y a eu l’agression de dimanche. Après une nuit passée aux urgences dont il sort avec 3 jours d’ITT, Nicolas se rend au commissariat, dépose plainte et rentre chez lui. Là, il réalise ce qui lui est arrivé. Et surtout ce qui aurait pu se passer: «Enfermé chez moi, je tournais en rond, je pleurais, j’imaginais que mon agresseur allait revenir, je pensais à ce qu’il serait advenu s’il avait eu une arme ou si mes voisins n’étaient pas intervenus… Puis, je l’ai aperçu par la fenêtre. J’ai choisi de m’installer chez des amies. Il fallait que je parte. Et que je parle.»
Médiatisation
Nicolas décide en effet de raconter son histoire, soutenu par les structures locales de défense des droits des LGBT et notamment par la LGP Bordeaux,. «Nous avons beaucoup discuté de l’impact qu’aurait une médiatisation de cette affaire, confie Matthieu Rouveyre, membre actif de l’association. Les deux jeunes qui ont été agressés au miroir d’eau il y a deux semaines(lire article) ont préféré ne pas s’exposer. Nicolas qui n’était pas par exemple out à son boulot, a choisi malgré tout de donner un visage à l’homophobie». Car, comme en a attesté mercredi une voisine auprès des services de police, l’agresseur, dans son déchaînement de violences, a bel et bien proféré des insultes liées à la sexualité du jeune homme…
L’avocat Uldrif Astié qui est en charge du dossier souhaite d’ailleurs en priorité que le parquet reconnaisse «le caractère clairement homophobe de cette affaire. Ce qui n’est malheureusement pas toujours le cas. Comme pour les agressions racistes il y a quelques années, il est encore difficile de faire prendre en compte ces circonstances aggravantes. Or, sans ces dernières, les coups et les blessures sans armes entraînant moins de huit jours d’ITT -ce dont a été victime Nicolas- sont pour la justice, non pas des délits mais de simples infractions, moins sévèrement punies et qui passent généralement inaperçues dans l’activité des tribunaux correctionnels…»
Le voisin a été placé en garde à vue ce matin, et il incombe désormais au parquet de trancher: Nicolas a-t-il été victime d’injures homophobes et de violences légères ou de violences aggravées car commises en raison de l’orientation sexuelle de la victime?