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 d’ADHEOS

A 36 ans, l’essayiste lesbienne Caroline Fourest publie avec sa compagne une biographie fournie de Marine le Pen dans laquelle elle analyse le nouveau discours de la présidente du Front national.
 
 «Non, je n’aime pas me faire insulter. Mais si l’on ne veut pas monter sur le ring, on ne travaille pas sur les extrémismes…» Laïque, féministe, lesbienne, Caroline Fourest dérange. Qu’elle décline ses chroniques sur France Culture, Le Monde ou, autrefois, Charlie Hebdo, la journaliste n’échappe pas aux critiques. On lui reproche tout et son contraire: elle serait pro-islam pour certains, islamophobe pour d’autres, laïcarde, intégriste…

 
 
Touche-à-tout, la jeune femme n’est pas facile à cerner : intellectuelle, militante, chroniqueuse ou encore prof à Sciences-Po, elle multiplie les casquettes mais change rarement de cible. Dans son viseur, intégrisme religieux et extrême-droite.
 
Bataille du pacs
A 14 ans, elle quitte Aix-en-Provence et un collège privé catholique pour s’installer à Paris. Sa mère l’inscrit alors dans le public. Une première libération avant les apprentissages de l’adolescence: elle découvre son homosexualité, et une conscience politique qui la pousse à militer pour les droits des minorités.
 
C’est ce qui la mène au journalisme. A 18 ans, elle infiltre une secte pour le magazine Transfac, puis s’intéresse aux liens entre extrême-droite et homos pour TÊTU (numéro 30). Elle va jusqu’à fonder une revue avec sa compagne, la politologue Fiammetta Venner (photo). Prochoix, revue «du droit de choisir», se fait fer de lance au moment des débats sur le pacs. Fourest occupe alors la tête du Centre gay et lesbien de Paris. En tête des cortèges, elle dénonce l’intégrisme de ceux qui brandissent la Bible pour s’opposer aux unions homos.
 
Plongée au cœur du FN
La récente montée en puissance de Marine le Pen l’amène à se plonger au cœur d’un Front national qu’elle avait délaissé pour s’intéresser à l’intégrisme musulman. Dans son livre Marine le Pen, Fourest montre comment la présidente du FN a changé le discours du parti pour mieux attirer un électorat a priori ancré à gauche.
 
«Alors que le FN a milité contre le féminisme et le pacs de toutes ses forces, Marine le Pen est obligée de reconnaître qu’elle-même est une femme libre, divorcée, et que le pacs n’est pas si mal, constate la journaliste. Notre société s’est décalée vers la droite sur les questions d’identité et d’immigration, mais le mouvement de fond de sécularisation et d’égalité est plus fort qu’eux: ils sont obligés de suivre.»
«Une fois qu’on s’est débarrassé des immigrés puis des islamistes, il y a toujours d’autres boucs émissaires sur la liste» «Le FN se définit par rapport à ses ennemis»
Selon elle, s’il y a toujours eu des homos au FN, une nouvelle frange s’encarte, séduite par le discours de Marine. Souvent issus des quartiers populaires, ils sont préoccupés par le retour du communautarisme et de l’ordre moral au détriment de leurs libertés individuelles. Caroline Fourest met en garde: les signaux envoyés par Marine le Pen, apparemment défenseurs de liberté, sont en fait guidés par son désir de rafraîchir le discours xénophobe du parti.
 
«Le FN se définit par rapport à ses ennemis. Quand l’ennemi prioritaire était Mai 68 et le féminisme, il assumait son intégrisme. Si l’ennemi c’est l’islamisme, vive la liberté sexuelle! Mais il faut se rappeler que dans ce monde-là, une fois qu’on s’est débarrassé des immigrés puis des islamistes, il y a toujours d’autres boucs émissaires sur la liste… Cette conversion, tardive, du FN à la laïcité est aussi sincère que si je devenais cardinal!»
 
Marine le Pen,
de Caroline Fourest et Fiametta Venner,
Editions Grasset