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 d’ADHEOS

Dans ce pays où l’Eglise et l’Etat restent liés, le second voudrait permettre à la première à célébrer des mariages de couples homos. Quitte à pousser les deux au divorce?
 
La colère gronde dans les rangs du clergé danois. Visé: Manu Sareen (photo), qui vient de prendre la tête du ministère des Cultes et de l’égalité des chances. A peine arrivé, et voilà que cet ancien conseiller municipal de Copenhague né en Inde il y a 44 ans, élu de la Gauche radicale, a annoncé qu’il ferait tout son possible pour autoriser le mariage des couples homosexuels à l’Église, le plus rapidement possible. Il a le soutien de la nouvelle majorité parlementaire de centre-gauche, élue en septembre dernier, qui en a d’ailleurs fait une de ses promesses électorales.
 
Les dirigeants de l’Église luthérienne danoise – l’Eglise d’État à laquelle appartiennent 80% des Danois – ne digèrent pas. Quatre des dix évêques du royaume ont ouvertement exprimé leur opposition. Fin novembre, trois d’entre eux ont signé une tribune dans le quotidien Kristeligt Dagblad, où ils rappellent que «pendant des siècles», le mariage a été considéré «bibliquement, théologiquement et culturellement, comme un homme et une femme qui se promettent fidélité et amour, en tant que deux personnes de sexe différent».
 
«Dieu n’a pas inventé le mariage»
Réponse du ministre: «Le mariage, ce n’est pas quelque chose que Dieu a inventé. C’est quelque chose que les hommes ont établi, et ce que les hommes établissent, ils peuvent le changer.» D’ailleurs, selon diverses enquêtes d’opinion, une majorité des Danois serait favorable à ce que les couples homosexuels puissent se marier à l’église. En 1989, le royaume scandinave avait été le premier pays au monde à autoriser l’union civile des couples de même sexe, appelé au Danemark «partenariat».
 
Mais plus d’un quart des prêtres ont déjà annoncé qu’ils refuseraient de marier les couples homos. 3% d’entre eux seraient même prêts à renoncer à leur vocation, si la réforme du droit marital était adoptée. Les évêques réfractaires mettent en garde: «Le parlement peut, s’il dispose d’une majorité, établir que le mariage et le partenariat sont la même chose. Mais le parlement ne peut pas imposer à l’Église un mariage sexuellement neutre.»
 
Sur la base du volontariat
Une chose est sûre: Manu Sareen, soutenu par la majorité de centre-gauche et plusieurs évêques dont celui de Copenhague, ne renoncera pas. Nommé trois fois par l’association LGBT Danemark «homme politique de l’année», il avait, pendant la campagne électorale, menacé de quitter l’Église luthérienne si elle continuait à s’opposer au mariage gay. Il assure qu’il ne forcera personne à unir deux personnes de même sexe. Mais que ceux qui souhaitent le faire devraient en avoir la possibilité.
 
Le quotidien Politiken s’interroge: la séparation de l’Église et de l’État est-elle pour bientôt? Morten Thomsen Højsgaard, président de l’association protestante Bibelselskabet et spécialiste du sujet, répond: «Nous pouvons observer aujourd’hui une crise historique dans le mariage de raison entre l’État et l’Église et nous nous dirigeons vers une sorte de séparation.» Rien n’indique, cependant, que le clergé danois soit prêt à aller jusque-là, d’autant plus qu’une majorité des prêtres est favorable à la réforme.