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 d’ADHEOS

À l’occasion de la Journée mondiale contre l’homophobie et la transphobie, un documentaire revient sur les persécutions et les violences sexuelles et physiques subies par ces déportés au sort longtemps méconnu.

C’est un pan longtemps oublié de l’histoire des camps de concentration. Le documentaire Le triangle rose : Homosexuels et lesbiennes face au nazisme, réalisé par Michel Viotte et diffusé à 22h40 sur France 5, dimanche 12 mai, revient, grâce à de nombreuses archives, sur l’enfer vécu par les déportés homosexuels, ainsi que les moyens mis en œuvre par le régime nazi afin d’éradiquer les personnes LGBT+, ciblant en particulier les hommes gays.

Durant la République de la Weimar, entre 1918 et 1933, Berlin est encore considérée comme une “capitale mondiale” de l’homosexualité, comme le rappelait un documentaire de France Inter, en raison de ses nombreux bals travestis, de ses clubs et de la diversité de ses lieux de rencontres. Un vent de liberté souffle sur l’Allemagne, qui fait également figure de précurseur en matière de militantisme homosexuel. Malgré l’interdiction des rapports intimes entre hommes dans le Code pénal, les autorités font preuve de tolérance, ce qui favorise l’épanouissement des identités gays et lesbiennes dans le pays.

L’arrivée d’Hitler au pouvoir marque la fin de cet “âge d’or”. Le régime nazi considère les homosexuels, et plus particulièrement les hommes, comme déviants. Un système répressif radical se met en place et trouve son paroxysme avec l’arrestation, la déportation et la mort de plusieurs milliers d’homosexuels dans les camps, sous la férule d’Heinrich Himmler.

Des déportés distingués par un triangle rose

Entre 5 000 et 15 000 Allemands sont déportés du fait de leur orientation sexuelle. Souvent isolés dans des bâtiments spécifiques, ils ont interdiction d’approcher les autres détenus pour ne pas les “contaminer” du fait de “leurs mœurs dissolues”. Afin de les distinguer, ils sont identifiés par le chiffre 175 ou la lettre A, mais surtout par un triangle rose.

Walter Schwarze, qui témoigne dans le documentaire, fut interné dans le camp de Sachsenhausen, près de Berlin. “Les gens étaient emmenés par ordre alphabétique, et ils recevaient un coup sur la tête ou sur le dos, raconte l’ancien prisonnier. J’ai reçu mon numéro de prisonnier accompagné d’un triangle rose. Rose, cela voulait dire ‘salope’.” Les SS lui donnent l’ordre de prendre une corde et d’aller se pendre directement, lui affirmant qu’il ne sortirait plus jamais de ce camp, ce qu’il réussira finalement à faire.

Les homosexuels sont affectés aux travaux les plus durs. Une façon de les anéantir par le travail, la faim et les tortures. Mais ils sont également victimes d’agressions sexuelles et de viols à répétition par les dignitaires nazis et les kapos qui encadrent les déportés.

Des rapports sexuels forcés avec des femmes déportées

L’Autrichien Josef Kohout en témoignait en 1972 dans un livre, Les hommes au triangle rose, dont certains passages sont lus dans le film : “Je n’avais rien d’autre à faire que de me mettre sous la protection d’un doyen ou d’un Kapo (…) qui me garantirait un supplément de nourriture. En échange, je devais être son ami et partager son lit. (…) Cette volonté de survivre à la bestialité des SS avait son prix. Il fallait se débarrasser de toute idée de morale, de bienséance, d’honneur.”

Les nazis mettent également en place, dans certains camps, ce qu’ils qualifient de programmes de “rééducation”. Des maisons de passe sont créées sur place afin d’obliger les hommes gays à coucher avec des femmes considérées comme asociales, qui portent un triangle noir. Une épreuve qui s’inscrit dans un exercice dit “de normalisation”. Josef Kohout raconte : “Ça n’était pas seulement désagréable, mais c’était un véritable tourment. Quel soulagement attendait-on pour moi ? Quel sentiment de plaisir aurais-je pu éprouver à la vue de la fille qui, épuisée, allongée sur le lit, soulevait les jambes et criait ‘Mais fais-le donc, fais-le donc’. D’autant plus qu’un SS nous observait par le judas.”

Les homosexuels rescapés des camps retrouvent la liberté dans une société où l’homophobie reste la norme jusque dans la loi. Les relations homosexuelles entre hommes ne sont dépénalisées qu’en 1968 en Allemagne de l’Est et l’année suivante en Allemagne de l’Ouest. Le paragraphe 175 ne disparait officiellement du Code pénal qu’en 1994 dans l’Allemagne réunifiée. Et ce n’est qu’en 2022 que le Parlement allemand place ces victimedu nazisme “au centre de la cérémonie de commémoration”. 

Le documentaire Le triangle rose : Homosexuels et lesbiennes face au nazisme, réalisé par Michel Viotte est diffusé dimanche 12 mai, à 22h40, sur France 5 et sur la plateforme france.tv.

 

Source : francetvinfo.fr