La ministre de la Santé revient sur ses propos de juin et déclare aujourd’hui qu’elle ne pourra pas permettre aux homos de donner leur sang. Explications.
Il y a exactement six mois, la ministre de la Santé assurait que l’«on peut et on doit revoir cette politique» qui empêche les gays de donner leur sang, puisque «l’orientation sexuelle n’est pas en soi un risque» (lire article). Marisol Touraine poursuivait la promesse faite par le président François Hollande avant son élection, et réaffirmée à TÊTU (lire l’interview d’Aurélie Filipetti l’an dernier).
Des promesses qui semblaient rétrospectivement bien hâtives, car, depuis, la ministre de la Santé s’est confrontée, comme beaucoup avant elle, à la résistance de l’Etablissement français du sang (EFS). Et elle a effectué un revirement à 180° ce matin au micro de RMC et BFMTV, en confirmant que le don du sang resterait interdit pour les homosexuels masculins.
L’éternel dilemme
«Je ne trouve pas normal qu’il y ait un élément de discrimination», a-t-elle répété. Mais «je ne peux lever l’interdiction qui existe que si on me donne une garantie absolue que cela n’apportera pas plus de risques pour les transfusés», a complété la ministre ce matin. «Aujourd’hui, je ne peux pas lever cette interdiction».
Avant elle, Xavier Bertrand puis Roselyne Bachelot avaient promis de lever l’interdiction du don du sang ou d’organes par les gays, avant de se raviser l’une et l’autre. Sa prédécesseure, Nora Berra, avait même créé la polémique en parlant très maladroitement de l’homosexualité comme d’un «facteur de risque» pour le VIH.
Discriminations contre principe de précaution
Gouvernement après gouvernement, les ministres sont écartelés entre la situation d’exclusion des homosexuels de ce don et de celui du don d’organes, vécue par certains comme une discrimination, y compris par le Défenseur des droits Dominique Baudis, et l’intransigeance de l’EFS. Le nouveau président de cet organisme chargé de la gestion des produits sanguins en France, François Toujas, assurait encore en septembre que «le don du sang n’est pas un droit, c’est un acte de solidarité», évoquant en revanche «le droit du receveur» de ne pas courir de risque.
Très prudents après l’affaire du sang contaminé, des professionnels de la santé justifient en effet l’interdiction par la plus grande prévalence du virus du sida dans la communauté homosexuelle, avec un nombre estimé de contaminations 200 fois supérieur à celui des personnes contaminées par un rapport hétéro… et une proportion évaluée à 20% de gays qui ignorent leur séropositivité. A noter enfin qu’après la contamination, il existe une période de 10 à 12 jours durant laquelle l’infection n’est pas détectable lors d’un dépistage.
- Source TETU