La Cour suprême des Etats-Unis s’est saisie lundi du dossier ultra-sensible des discriminations contre les homosexuels et les personnes transgenres, à qui l’administration de Donald Trump ne souhaite pas élargir les protections applicables aux femmes dans le monde du travail.
Le temple du droit américain a retenu trois dossiers de licenciements contestés, concernant deux homosexuels et une femme transgenre, qui seront examinés à l’automne pour une décision en 2020.
La Cour suprême devra répondre à une question simple qui fait l’objet d’un vif débat politique: est-ce que la loi fédérale de 1964 qui interdit les discriminations "sur la base du sexe", entre autres, s’applique à l’orientation et à l’identité sexuelle ?
L’administration démocrate de Barack Obama soutenait une interprétation large du dispositif de 1964, mais le gouvernement de son successeur républicain a pris le contre-pied.
En l’absence de directive claire, les tribunaux rendent des décisions contradictoires. Ainsi, Donald Zarda, un moniteur de parachutisme gay de New York a gagné en justice après son renvoi, tandis que le travailleur social Gerald Lynn Bostock a perdu dans une affaire comparable en Géorgie.
Leurs dossiers seront examinés lors de la même audience, a décidé la Cour suprême, où les juges conservateurs sont majoritaires depuis l’arrivée de deux magistrats nommés par le président Trump.
"Quand mon frère m’a dit qu’il était licencié, j’ai été choquée", a confié Melissa Zarda, qui a repris le combat judiciaire de son frère Donald après son décès en 2014. "Je ne pouvais pas croire qu’on pouvait être licencié parce qu’on était gay, je pensais que c’était illégal. J’espère que la Cour suprême va dire que ce qui est arrivé à mon frère était mal", a-t-elle ajouté dans un communiqué.
Chrétien fervent
La plus haute juridiction américaine s’est également saisie du dossier d’Aimee Stephens, qui a travaillé pendant six ans dans une société de services funéraires de Detroit comme homme, tout en se sentant femme.
En juillet 2013, elle a écrit à son employeur pour lui annoncer son intention d’entamer sa transition vers le sexe féminin. Comme premier pas dans ce processus, elle lui a demandé un uniforme féminin. Quelques semaines plus tard, le patron de Harris Funeral Homes, qui revendique ses valeurs chrétiennes, l’a renvoyée, en lui expliquant que "ça ne pourrait pas marcher".
Elle a alors saisi la justice. En première instance, un juge a estimé que son employeur avait le droit de la licencier en vertu d’une loi qui protège les libertés religieuses. En mars 2018, une cour d’appel est revenue sur cette décision. Le tribunal a jugé que son employeur l’avait discriminée parce qu’elle est transgenre et qu’il s’agissait d’un type de discrimination protégée par la loi fédérale.
Thomas Rost, propriétaire de Harris Homes, a saisi la Cour suprême pour annuler cette décision. Celui qui se décrit comme un "chrétien fervent" a invoqué dans son recours "sa liberté de conscience", mais aussi la nécessité "d’éviter tout ce qui peut déranger ses clients dans leur travail de deuil".
Il a reçu le soutien de l’Alliance Defending Freedom, une association conservatrice qui défend les libertés religieuses. A l’inverse, Aimee Stephens a reçu l’appui de la puissante Association de défense des droits civiques (ACLU) qui a appelé lundi la Cour suprême à confirmer la décision de la cour d’appel.
L’inverse "serait catastrophique et reléguerait la communauté LGBTQ à un statut de citoyen de seconde zone", a mis en garde un de ses responsables James Esseks. "Ce qui m’est arrivé m’a fait beaucoup de mal ainsi qu’à ma famille", a confié Aimee Stephens. "J’espère que la Cour suprême va confirmer qu’ils ont eu tort de me licencier parce que je suis transgenre."
- SOURCE E LLICO