La Rochelle accueille son premier festival gay et lesbien ce week-end. Ville ouverte, lieu de passage et de tourisme : toutes les sexualités s’épanouissent dans la cité gay friendly.
«J’assume ma sexualité avec beaucoup plus de facilité depuis que je vis à La Rochelle. Je suis originaire du Havre ; là-bas, je serais moins à l’aise, j’aurais à supporter le regard des autres alors qu’ici rien, on s’affiche, c’est dix fois plus facile. Jamais une remarque », explique Farid, organisateur du premier festival rochelais gay et lesbien, ce week-end, intitulé Pool Paradise Party.
Olivier et Katy sont les propriétaires de l’établissement de nuit Le Paradise, boulevard André-Sautel. « Nous avons eu plusieurs boîtes de nuit en Tourraine. Des établissements classiques mais, en venant à La Rochelle, on a décidé d’ouvrir un club gay friendly. Ça a changé mon point de vue sur le monde de la nuit. À l’intérieur, aucune bagarre, aucun esclandre, les gens sont d’une ouverture d’esprit, les hétéros sont nombreux à venir aussi, car ils savent qu’ils vont passer une soirée tranquille. Les imbéciles, eux, restent à la porte », déclare Olivier.
Farid et Olivier sont à l’origine de l’organisation de ce premier festival gay et lesbien rochelais. « Nous souhaitions créer un petit événement, mais l’engouement des partenaires a développé la manifestation. L’association saintaise Adhéos (Association d’aide de défense homosexuelle pour l’égalité des orientations sexuelles) a accepté de se joindre à nous, dans le cadre d’une action de prévention et de sensibilisation à l’homophobie. »
Une ville de passage
« Il fallait simplement que quelqu’un ose. Le climat est favorable, ultra-tolérant à la communauté homosexuelle », estime Thomas, employé au Paradise. Comment expliquer cet environnement favorable à l’homosexualité, cette vision pro-gay véhiculée à La Rochelle ?
« Cette ville est un lieu de passage par excellence, par ses qualités touristiques sûrement, mais qui le reste finalement toute l’année sur la côte ouest, on le remarque dans le monde de la nuit. Les Rochelais sortent peu, les personnes qui n’hésitent pas à venir sont étudiants, nouveaux arrivés dans la région, aussi les élèves étrangers de l’université. La Rochelle accueille des personnes différentes chaque année. On voit la différence entre l’hiver et l’été, la faune n’est pas la même. Beaucoup de Parisiens descendent sur la côte », décrivent les organisateurs.
Ce brassage, le caractère d’ouverture de la cité rochelaise et sa qualité de vie sont autant d’aspects favorables, selon eux, qui permettent à chacun d’assumer sa sexualité, quitte à sortir du placard, faire son coming-out.
« Droit à l’indifférence »
Définitivement plus rose, alors, La Rochelle ? Chez Adhéos, on rappelle que si l’homosexualité semble moins taboue, le combat contre l’homophobie au quotidien reste d’actualité. « Saintes est aussi une ville gay friendly, elle est plus reculée dans les terres, mais ça n’a encore rien à voir avec la campagne », détaille Bertrand Gire, président d’Adhéos, qui relève ainsi la difficulté à vivre son homosexualité loin d’un cadre urbain.
Ce festival n’est pas une marche de fierté, une gay-pride, les organisateurs n’ont d’ailleurs pas souhaité de soutien de la part de l’administration ou de la Ville. « Il faut une logistique super-importante pour mettre en place ce type de cortège. Bien sûr, nous voulions un événement à proprement parler, faire connaître l’univers gay et faire de prévention, mais sans revendication. Ce n’est pas une grosse machinerie, nous nous reposons sur trois établissements prêts à recevoir les différentes animations (lire ci-dessous) », expliquent-ils.
Le comité d’organisation veut aussi prouver qu’il est capable de bien se débrouiller seul, quitte à recommencer l’année prochaine. Il a ainsi soigné sa communication pour éviter les clichés ou la provocation inutile. « Le but, c’est de donner envie au plus grand nombre de partager un moment gay festif, d’où le flash-mob, la croisière ; tout le monde est le bienvenu ce week-end. »
Les membres d’Adhéos, eux appellent à « un droit à l’indifférence » lorsque deux hommes se tiennent par la main. Pour autant, l’homophobie existe comme partout, même à La Rochelle si ouverte et tolérante. Certains estiment que la bonne réputation auprès de la communauté homosexuelle dont jouit la ville n’est même plus d’actualité.
Le centre-ville compte en effet moins d’établissements aux couleurs arc-en-ciel qu’il y a quelques années. « Tant mieux », affirment des homosexuels qui souhaitent faire partie du paysage sans avoir besoin de choquer ou de rester entre soi.
- Source Sud-Ouest