Avant de s’en prendre à des policiers puis d’assassiner le gendarme Arnaud Beltrame dans un Super U, l’auteur des attentats de 2018 qui ont fait quatre morts à Trèbes et à Carcassonne, Radouane Lakdim, avait tiré sur deux hommes sur un lieu de drague gay. Si le terroriste est mort, le procès de ses complices présumés commence ce lundi.
Dans la mémoire collective, les attentats djihadistes de Trèbes et Carcassonne, le 23 mars 2018, restent principalement associés au nom d’Arnaud Beltrame. À juste titre, ce gendarme ayant héroïquement perdu la vie après s’être substitué, au Super U de Trèbes, à une femme que le terroriste avait prise en otage. Mais alors que s’est ouvert ce lundi 22 janvier le procès de sept personnes accusées d’être complices de ces attentats qui ont fait quatre morts, les circonstances de cette macabre journée refont surface, rappelant qu’avant de se retrancher dans le supermarché où il a été abattu par le GIGN, Radouane Lakdim avait commencé son itinéraire meurtrier par un lieu de drague gay bien connu dans le coin, où il a fait deux victimes dont un mort.
C’est proche du parking des Aigles, à Carcassonne, que Radouane Lakdim commet ainsi son premier meurtre ce matin-là. À l’époque des faits, les premiers éléments sortis dans la presse font état de deux victimes sur lesquelles le djihadiste âgé de 25 ans a tiré : Renato Gomes, 26 ans, qui a miraculeusement survécu à un tir en pleine tête, et Jean Mazières, un viticulteur de 61 ans, mort sur le coup et dont le corps a été retrouvé dans un fossé à proximité.
“J’ai allumé deux pédés…”
Mais pour quelle raison ces deux hommes se sont-ils retrouvés sur le chemin du terroriste ? En 2018, plusieurs articles de presse décrivent un vol de voiture qui tourne mal, Renato Gomes étant le chauffeur de la voiture et Jean Mazières, son passager. “Jeannot se trouvait ce matin-là au mauvais moment au mauvais endroit”, en conclut le maire de son village dans Le Parisien, faisant auprès de BFMTV le portrait d’“un viticulteur à la retraite, un natif du village, issu de l’une des plus vieilles familles de Villedubert. Il était marié, avait un enfant et était très impliqué dans la vie de la commune puisqu’il faisait partie du comité des fêtes.”.
Après ce premier crime, Radouane Lakdim part dans la voiture volée. Sur son chemin il tire sur quatre policiers, en blessant un grièvement, puis finit son épopée meurtrière au Super U de Trèbes où il tue encore deux personnes d’une balle dans la tête. Il prend alors en otage Julie L., une employée de 39 ans, qui sera échangée contre le colonel Arnaud Beltrame. Se présentant comme “brigadier de l’État islamique”, le djihadiste se vante auprès d’elle des crimes commis dans la matinée : “J’ai allumé deux pédés… Bien fait pour lui… j’suis arrivé à l’improviste, ils étaient cachés, je leur ai mis deux balles dans la tête… Sans pitié…” décrit-il, avant d’être abattu quelques heures plus tard dans l’assaut du GIGN. Le Monde reproduit cet échange dès 2018, sans que le motif homophobe de ses actes n’attire toutefois davantage l’attention.
Radouane Lakdim visait un lieu de cruising
Il faudra attendre ce mois de janvier 2024 pour que ces faits soient rappelés dans le livre publié par la survivante, signé sous le pseudonyme de Julie Grand et intitulé Sa vie pour la mienne (ed. Artège), en hommage au gendarme héroïque. Au sujet des deux hommes sur lesquels Radouane Lakdim a tiré dans la matinée, elle écrit : “Il les a visés car il les pense homosexuels – c’est la réputation de ce parking connu dans la région pour être un lieu de rencontres gay. Il s’empare du véhicule d’une de ses victimes. Quelques minutes plus tard, il circule dans Carcassonne, cherchant à abattre des militaires.”.
Dans son article consacré ce lundi à l’ouverture du procès des sept personnes soupçonnées de complicité, Le Monde rappelle que Radouane Lakdim “ne faisait pas mystère de son aversion pour les homosexuels”. Le quotidien appuie le témoignage de Julie Grand et fait un récit légèrement différent que celui présenté en 2018. Selon notre confrère auteur de l’article, Soren Seelow, le terroriste islamiste croise Renato Gomes dans un sous-bois, et lui demande ce qu’il fait ici. Ce dernier lui répond qu’il ne fait que fumer, avant de recevoir dans la tête un tir de pistolet automatique. Quelques instants plus tard, le terroriste abat d’une balle à bout portant Jean Mazières sur un sentier de ce sous-bois.
Alors, les deux hommes s’étaient-ils rencontrés sur ce lieu de drague avant l’attaque ? Se trouvaient-ils, comme évoqué initialement, ensemble lorsque le terroriste s’en est pris à eux ? Le procès, qui se tient devant la cour d’assises spéciale de Paris jusqu’au 23 février, éclaircira sans doute les circonstances de la première phase homophobe de cet attentat djihadiste.
- SOURCE TETU