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 d’ADHEOS

En choisissant comme tête de liste aux Européennes François-Xavier Bellamy, un catholique conservateur assumé, opposé au mariage gay, Les Républicains prennent le risque de se laisser enfermer dans des thèmes avec lesquels la droite n’est pas à l’aise.
 
Ex-étudiant brillant – classe préparatoire au lycée Henri-IV, université de Cambridge, Normale sup’ et agrégation de philosophie -, auteur d’essais et jeune enseignant en prépa, Xavier Bellamy est connu pour ses positions conservatrices sur les sujets sociétaux – et notamment son soutien à la Manif pour tous. Des thème que d’aucuns dans son camp craignent qu’ils soient autant d’embarrassants sparadraps.
 
Avant même l’officialisation de sa désignation comme tête de liste, le rappel de son opposition – "personnelle" – à la légalisation de l’interruption volontaire de grossesse a fait lever les yeux au ciel à bon nombre de ses compagnons politiques: "On n’a pas envie de passer notre temps à se justifier sur ça", s’inquiète une dirigeante du parti. "Que diront les Marcheurs pendant la campagne ?", s’alarme un autre.
 
Le pari de Laurent Wauquiez ? Rassembler ses propres troupes. "La France est la fille aînée de l’église: sur les sujets sociétaux, une partie de la droite reste dans cette vision traditionnelle", fait observer le directeur du département Politique et opinion chez Harris Interactive, Jean-Daniel Lévy.
 
Certes, "mais une partie seulement", répond un parlementaire LR, sceptique sur la stratégie du parti, qui renvoie à l’histoire mouvementée de la droite française sur ces questions. De l’IVG et le divorce par consentement mutuel, instaurés sous la présidence de Valéry Giscard d’Estaing, au PaCS et à l’ouverture du mariage aux couples de même sexe, la droite s’est régulièrement interrogée sur le bon positionnement à adopter.
 
Entre opposition implacable menée par sa frange la plus conservatrice et dissonances menées par ses troupes davantage libérales, elle s’est finalement toujours divisée.
 
Tea-party à la française ?
 
Manif pour tous et autres Veilleurs, qui se voulaient sous le quinquennat Hollande les hérauts d’une révolution conservatrice à l’image du "Tea-Party" américain, n’ont-ils pas amorcé un mouvement de l’opinion ?
 
"Pas du tout", conteste Jean-Daniel Lévy. "On voit certes des franges se radicaliser, des noyaux marqués, mais globalement, sur la société française, on voit une plus grande ouverture". Mieux: "Les Français ont été opposés au PaCS, ils y sont devenus favorables; ils ont été opposés au mariage, ils y sont devenus favorables. Aux municipales de 2014, l’un des enjeux brandis par la droite était le mariage pour tous, voté un an plus tôt. Mais le sujet n’avait pas été aussi déterminant qu’espéré", rappelle encore le politologue.
 
Lors de la campagne de 2017, l’indéfectible soutien des conservateurs à François Fillon n’avait pas non plus suffi à l’ancien Premier ministre pour se qualifier pour le second tour de la présidentielle.
 
Le pari de Laurent Wauquiez, pour hautement risqué qu’il soit, est pourtant assumé: mi-novembre, il s’était rendu chez Sens commun, l’émanation politique de la Manif pour tous dont François-Xavier Bellamy est réputé proche, en endossant la bataille contre l’ouverture de la procréation médicalement assistée à toutes les femmes.
 
Devant un public conquis, il avait mis en garde contre "la marchandisation des gamètes" et "l’eugénisme", et suscité un tollé en glissant une référence au "nazisme". Mais si certains veulent se convaincre que le conservatisme de François-Xavier Bellamy peut se révéler in fine un avantage pour Les Républicains, le jeune enseignant devra faire face à d’autres critiques.
 
D’abord, à celle d’accointances avec l’extrême droite: fin novembre, Marion Maréchal voyait dans la personnalité de François-Xavier Bellamy une opportunité "d’alliances" – l’intéressé conteste. Ensuite, le sens politique du novice est remis en cause: candidat LR aux législatives de 2017 dans la très conservatrice et droitière première circonscription des Yvelines, à Versailles, il avait échoué à se faire élire.
 
C’est enfin son positionnement sur l’Union européenne qui inquiète certains: en 2005, il avait voté Non au référendum sur la Constitution européenne. A l’inverse de sa famille politique d’aujourd’hui.