La drag queen Minima Gesté revient sur les propos tenus cette semaine par Marion Maréchal-Le Pen au sujet de sa participation au relais de la flamme olympique, lors du passage de celle-ci les 14 et 15 juillet à Paris.
Une drag queen olympique. Le 14 juillet, Minima Gesté participera au relais de la flamme olympique à Paris, a annoncé la Ville cette semaine. L’artiste a reçu en retour une vague de commentaires haineux, en particulier à la suite d’une déclaration de Marion Maréchal-Le Pen, tête de liste du parti d’Éric Zemmour aux élections européennes, interrogée ce jeudi 2 mai sur TF1 : “Faut-il faire semblant que cela représente la France ? Cette personne fait des représentations qui sont particulièrement vulgaires, hypersexualisées… Je ne considère pas que c’est une bonne façon de représenter la France aux yeux du monde.” Le harcèlement numérique est tel que la municipalité s’est fendue d’un communiqué rappelant que “les injures publiques, de surcroît à caractère homophobe et transphobe, sont un délit” et promettant que “la Ville de Paris l’aidera dans les suites judiciaires qu’elle pourrait donner”.
- Avant toute chose, comment es-tu devenue relayeuse de la flamme olympique ?
Minima Gesté : En plein mois de septembre, je suis sur mon téléphone, et je reçois un DM d’Anne Hidalgo. Un membre de son cabinet me dit que la maire de Paris veut qu’une drag queen porte la flamme à Paris. Il me propose de devenir relayeuse. J’hésite une seconde, et puis j’accepte. Bon, après, j’ai du remplir toute la paperasse, on est en France !
- Qu’est-ce qui t’a fait accepter une mission si périlleuse en talons hauts ?
J’ai accepté pour trois raisons. Déjà, parce qu’une drag queen a beaucoup d’égo, et que c’est une opportunité unique de pouvoir porter la flamme pour les Jeux olympiques ! Aussi, parce que pour moi la représentation est vraiment très importante. Qu’une drag queen, mais encore plus qu’un mec pédé, efféminé, fasse partie des 11.000 relayeur·euses, c’est nécessaire. Il faut montrer qu’on existe ! Enfin, je l’ai fait pour faire chier les gens, les remuer…
- Question pri-mor-diale : tu as prévu quoi comme tenue ?
Pour le relais, je serai en drag mais pas dans l’une de mes tenues habituelles. Je serai en jogging blanc et avec un tee-shirt blanc, comme tous les relayeurs : pas d’exception, même pour les drag queens. Du coup, je vais tout jouer sur la perruque, le maquillage et les talons. Justement, je suis en train de commander ma perruque. Et bien sûr que je serai en talons, mais ils ne feront pas 25 cm : les organisateurs vont me faire courir dans le Marais – of course – et c’est plein de pavés, donc à tous les coups je me casse la gueule !
- On peut choisir d’ignorer les réactions du lobby réac, mais tu as pensé quoi ?
J’en reviens pas que Marion Maréchal-Le Pen m’ait tagué sur Twitter. Moi, de base, je n’y suis que pour voir les dramas dans le milieu drag ! Honnêtement, je m’y attendais sans m’y attendre. Je me dis que le contexte politique joue beaucoup. Avec les élections européennes, Marion Maréchal-Le Pen essaye le plus possible de faire parler d’elle. Mais franchement, on n’a pas besoin de rajouter de la haine à de la haine.
- Comment tu as vécu cette séquence d’attaques ad hominem ?
Au début, je voulais archiver toutes les insultes que je recevais pour entamer des poursuites judiciaires, mais j’en ai reçu beaucoup trop, j’ai arrêté de compter. Le truc c’est qu’à toutes les étapes de ma vie, j’ai reçu des insultes. Ça fait vingt ans que j’en reçois. Donc j’étais préparé, en quelque sorte. Mais là, les proportions sont plus importantes, parce que le journaliste de TF1 a affiché mon visage et que Marion Maréchal-Le Pen a dit mon nom ; donc pour les réac, c’est plus facile de me trouver ! Ça peut avoir des répercussions dangereuses, parce que derrière sa prise de parole, elle lâche une armée de réactionnaires.
De recevoir tous ces commentaires, ça me remet dans la dure réalité des choses. Ça m’attriste aussi. Je me suis tellement entouré des bonnes personnes autour de moi que parfois, j’oublie ce qu’il se passe autour. Les réactions prouvent que le combat pour nos droits est loin d’être fini, et ça commence dès ce dimanche avec la manifestation pour les personnes trans !
- SOURCE TETU