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 d’ADHEOS

Des futurs mariés homosexuels se sont heurtés à des refus, notamment pour réserver une salle de mariage, en raison de leur orientation sexuelle…
 
Sandra Bibas est organisatrice de mariage, à l’initiative du premier Salon du mariage gay de juin dernier. Il y a quelques mois, elle a fait visiter un château à un couple de futures mariées. «La visite se passe bien, jusqu’au moment de valider la réservation de la salle, raconte-t-elle. La châtelaine, tout sourire, explique que ‘’quand même, ce serait bien que le marié dise son mot et vienne aussi visiter les lieux". Voyant qu’elle n’avait pas saisi, l’une des futures mariées dit: ‘’c’est moi le marié’’. La propriétaire a changé de visage. Elle s’est emportée en disant ‘’ah je ne fais pas ce genre de choses chez moi! Je suis contre cette loi!’’. J’ai répondu qu’elle n’avait pas le droit d’avoir des propos homophobes et que j’étais prête à témoigner si le couple le souhaitait, mais les jeunes femmes ont préféré partir.»
 
Près d’un an après l’adoption du Mariage pour tous, les couples homosexuels désirant se marier se retrouvent parfois confrontés à des discriminations de la part des prestataires. «J’ai surtout rencontré le problème avec les locations de salles, précise Sandra Bibas. Pour les autres prestataires, comme les photographes, les fleuristes, tout ce qui touche à l’art et la création, les gens sont accueillants.»
Délit pénal
 
Jennifer, qui se marie avec Ambre le mois prochain, a raconté une mésaventure semblable sur le blog La Mariée en Colère. «J’ai contacté un traiteur qui me plaisait bien en ne cachant rien mais dès qu’il a compris il a changé de ton, n’a pas refusé clairement parce que nous étions deux filles mais il n’était tout à coup pas disponible pour cette date. Ça m’a refroidie».
 
D’autres témoignages anonymes de couples parvenus à SOS Homophobie avaient incité l’association à publier un communiqué sur le sujet en juin dernier, rappelant que «le refus de fournir un bien ou un service en raison de l’orientation sexuelle relève de la discrimination et constitue un délit pénal» avec une peine pouvant aller jusqu’à 45.000 euros d’amende et trois ans de prison.
 
Contourner les refus
 
Pour éviter les refus ou les prestataires réticents, chacun a sa stratégie. Ambre a «trouvé une astuce»: elle parle de son amie au masculin. «J’attends le contrat pour être complètement ‘’honnête’’ et qu’il puisse ne pas revenir dessus mais j’ai horreur de ça», explique-t-elle.
 
Sandra Bibas, elle, «affiche la couleur dès le premier coup de téléphone» en précisant aux prestataires qu’il s’agit d’un couple homosexuel. «Des couples me disent qu’ils font appel à moi pour éviter de rencontrer des difficultés, des regards ou des choses pesantes qu’ils vivent tous les jours. On sert de ‘’filtre’’», ajoute-t-elle.
 
Olivier Legrand, également organisateur de mariage, veut au contraire «mettre les gens devant le fait accompli en leur disant au dernier moment». «L’idée c’est d’imposer le truc, explique-t-il. C’est ça la pédagogie. C’est une façon de dire: ‘’Regardez, ça s’est bien passé, est-ce que ça vous a vraiment dérangé qu’il y ait 80 % d’hommes à ce mariage? Non’’. Ils se retrouvent cons. Ça m’est arrivé avec une salle en Bretagne. Depuis, on s’entend bien».
 
Davantage de «refus» pour des couples de noirs ou de juifs
 
Manuel Delcourt, un organisateur de mariages qui s’était heurté au refus d’un grand tailleur pour un couple d’hommes, a quant à lui décidé de travailler tout le temps avec les mêmes prestataires. «Ça permet d’éviter les réactions négatives. J’entends tellement de discriminations vis-à-vis des couples homosexuels que ce genre de refus ne me surprend pas», se désole-t-il.
 
Soucieux de «ne pas dramatiser» ces difficultés, Manuel Delcourt précise toutefois qu’il se heurte à «plus de refus» pour des couples de noirs ou de juifs. Et se félicite d’avoir «aussi affaire à des propriétaires qui [lui] ont dit: ‘’tant mieux si c’est un mariage gay!’’».
Discriminations apparemment marginales
 
Les discriminations envers les futurs mariés de même sexe semblent en effet rester marginales. Hormis les témoignages reçus par SOS Homophobie, ni le Défenseur des Droits, ni la Ravad, qui assiste les victimes de discriminations, ni l’Association des Parents et futurs parents Gays et Lesbiens n’ont ainsi eu de retours à ce sujet.
 
Mais tous restent prudents sur l’interprétation à en donner, émettant l’hypothèse que le Mariage pour tous est «un événement trop récent pour engendrer des saisines», que ces couples «puissent méconnaître les recours possibles», ou qu’ils désirent peut-être ne pas aller au conflit, préférant se tourner vers des prestataires plus accueillants pour célébrer ce jour particulier.