L’écrivain sénégalais Mohamed Mbougar Sarr, lauréat du prix Goncourt, a déclaré jeudi soir à Dakar n’être pas “surpris par la polémique” au Sénégal sur un de ses livres qui traite de l’homosexualité, lors de sa première conférence publique dans son pays depuis sa distinction.
Mbougar Sarr, qui vit en France, a remporté en octobre 2021 le Goncourt, la plus prestigieuse distinction littéraire en France, pour son roman “La plus secrète mémoire des hommes” (éditions Philippe Rey et Jimsaan), une fiction sur la vie du défunt écrivain malien Yambo Ouologuem.
L’écrivain, né en 1990, est auteur de quatre livres dont “Terre ceinte” (2014), “Silence du coeur” (2017) et “De purs hommes” (2018). Ce dernier, se rapportant à l’homosexualité, relate l’histoire d’un homme dont le cadavre est déterré puis traîné par une foule hors d’un cimetière.
Mis en lumière par le prix Goncourt malgré son antériorité, l’ouvrage “De purs hommes” a été mal accueilli par certains qui ont estimé que l’écrivain s’y montre favorable à l’homosexualité, un phénomème largement assimilé à une déviance au Sénégal.
“La polémique et les amalgames ne m’ont pas surpris. Depuis longtemps, j’ai été préoccupé par une question, ce que signifie être romancier aujourd’hui”, a-t-il affirmé, devant un public formé notamment de chercheurs, d’élèves et d’étudiants. “Un romancier est quelqu’un qui ne capte jamais rien d’autre que l’inquiétude ambiante. Tout mon esprit est de garder l’essentiel. Mon travail est un travail de fiction. Tout ce qu’on peut proclamer sur moi comme fantasme et caractérisation est dérisoire”, a-t-il dit, lors de la conférence organisée par le site d’information sénégalais Seneplus.
“Lorsqu’on a une oeuvre qui est attaquée, on est le moins bien placé pour la défendre. Il y a quelque chose de mortifère pour l’auteur qui est attaqué de dire ‘voilà ce que j’ai voulu faire, quelles sont mes intentions'”, a indiqué l’écrivain de 31 ans. “Quand on est celui qui a créé l’oeuvre, c’est difficile et même pas souhaitable de se défendre. Tout ce que j’ai à dire est dans mon travail littéral. La réponse est là”, a-t-il poursuivi.
“A côté de cela, il y a un espace de débat qu’il faut toujours maintenir. Dans nos sociétés traditionnelles, il y a toujours eu des traditions, des rituels, des configurations qui privilégiaient des formes de tolérance. Comment les cadres qui permettaient une forme de tolérance ont été détruits”, s’est-il demandé.
- SOURCE E LLICO