Le 25 février, un lycéen homosexuel était jeté à terre et l’image de son agression était diffusée sur Internet. Le procès des responsables avait lieu hier.
C’est une provocation lamentable et gratuite, comme en colportent quotidiennement les réseaux sociaux. Le 8 janvier dernier, Thomas (*), élève de Terminale au lycée Jean-Zay à Orléans, a reçu ce message pitoyable sur son compte Instagram : « Tu veux une grosse bite de noir dans ton petit anus serré?? J’aime pas les pédés. Ok?? »
Thomas est homosexuel. Il ne le revendique pas. Il ne s’en cache pas non plus. À ces propos intolérables, il s’est contenté de répondre à son interlocuteur anonyme par un sibyllin « MDR (**) Et ton père?? » Une outrecuidance inadmissible dans l’esprit d’Édouard, lui-même lycéen à Orléans. Dès lors, celui-ci n’a plus nourri qu’une obsession : retrouver Thomas, qu’il ne connaissait même pas, et lui infliger une correction.
La vidéo a été vue plus d’un million de fois !
Le 25 février, Édouard et une quinzaine de lycéens ont attendu Thomas à la sortie de son établissement. Ils l’ont suivi puis, à la hauteur du théâtre, d’une « balayette », Édouard a fait chuter le jeune homme à terre. Témoin de la scène, Arthur, élève d’un autre lycée, a filmé celle-ci avec son téléphone portable.
Rentré chez lui, il s’est empressé de poster les images de l’agression sur les réseaux sociaux. La vidéo de quelques secondes a été vue plus d’un million de fois !
Jeudi, Édouard et Arthur répondent de cette agression devant le tribunal correctionnel d’Orléans. Et d’emblée, l’auteur de la balayette se défend de toute velléité homophobe, alors même qu’il a avoué « ne pas aimer les pédés ».
Quant au navrant commentaire en date du 8 janvier, il prétend n’en être pas l’auteur, puisqu’on avait fort opportunément piraté son compte Instagram.
« J’ai été idiot »
La défense d’Arthur n’est pas plus étayée. « J’ai pas réfléchi, j’ai été idiot. Je pensais que c’était pas grave », répète le prévenu.
Ces propos font bondir Me Anne Paladino. « Ce ne sont pas des gamins immatures. Nous n’avons pas affaire à des demeurés?! », s’emporte le conseil de Thomas, de ses parents et du Groupe action gay et lesbien du Loiret, parties civiles. Le conseil décrit les répercussions tragiques de l’agression et de l’humiliante diffusion des images sur Internet : « Thomas ne peut plus sortir de chez lui. Il fait des crises d’angoisse, n’a pas pu passer le bac blanc, ni le permis de conduire. Il aura un préjudice à vie ».
Le procureur de la République évoque, pour sa part, « un climat de haine qu’il ne faut pas banaliser. La bêtise n’excuse pas tout », estime Jean-Dominique Trippier, avant de requérir des peines de six et trois mois de prison avec sursis contre les prévenus. La défense tente alors de convaincre le tribunal de l’absence de toute volonté homophobe. Quitte à oser faire passer une déclaration non ambiguë pour une forme de langage générationnelle. Délibéré au 26 avril.
- SOURCE LA NOUVELLE REPUBLIQUE